
Au Burkina Faso, le masque est bien plus qu’un simple accessoire de danse ou un objet d’exposition : »il est une mémoire vivante, une force spirituelle, un trait d’union entre les générations et les mondes invisibles ». Pourtant, dans un monde globalisé et souvent uniformisé, la richesse symbolique des masques burkinabè semble parfois reléguée au second plan, face à une modernité qui efface, sans toujours comprendre.

Chaque région, chaque peuple du Burkina Faso — Mossi, Bwa, Bobo, Sénoufo, Lobi — possède son langage du masque, avec ses rites, ses messages et ses secrets. Sculptés dans le bois, ornés de fibres, de cauris ou de pigments naturels, les masques racontent l’histoire d’un village, honorent les ancêtres, célèbrent la fertilité ou protègent des mauvais esprits. Leur apparition n’est jamais anodine ; elle est chargée de significations profondes qui mériteraient d’être mieux connues, mieux valorisées.

Aujourd’hui, les masques circulent trop souvent comme des curiosités folkloriques ou des souvenirs pour touristes. Ils sont vendus, copiés, parfois vidés de leur essence. À l’heure où de nombreuses nations revendiquent fièrement leurs patrimoines immatériels, ne devrions-nous pas nous interroger sur la place que nous accordons à nos propres trésors culturels ? Protéger le masque, ce n’est pas simplement organiser des festivals ou exposer des œuvres dans des musées : c’est aussi transmettre aux jeunes générations la connaissance des traditions, le respect des rituels et la fierté d’une identité plurielle.

Face aux défis contemporains, le Burkina Faso a tout à gagner à puiser dans la sagesse de ses masques. Ils nous enseignent la patience, l’humilité, l’appartenance à un tout plus vaste que l’individu. Ils nous rappellent que l’homme est, avant tout, un être de lien — avec ses semblables, avec la nature, avec l’invisible.
Il est temps de redonner au masque sa juste place : non pas dans l’oubli ou l’exotisme, mais au cœur vivant de notre société, comme un symbole de résistance, de créativité et de fierté culturelle.
Stéphanie Judith BARRO