
Il crépite sur les braises comme un chant de la terre. Il embaume l’air de nos quartiers dès les premières heures de la soirée. Le maïs grillé, ce mets modeste et pourtant si chargé de symboles, fait battre le cœur des saisons au Burkina Faso. Quand il apparaît sur les étals improvisés, c’est tout un peuple qui retrouve un goût d’enfance, de partage, et d’identité.
À Ouagadougou, à Bobo-Dioulasso, à Tenkodogo ou dans les coins les plus reculés du pays, le maïs grillé est bien plus qu’un simple aliment de rue. Il est un rituel. En saison, hommes, femmes et enfants se pressent autour des petits foyers fumants, à la recherche de cette saveur fumée, légèrement sucrée, parfois croquante ou moelleuse, selon la cuisson.
Pour 100 ou 150 francs CFA, chacun peut s’offrir un bout de bonheur. Un épi de maïs rôti à la flamme vive, retourné avec soin par des mains expertes. Ce geste, ce savoir-faire transmis de génération en génération, révèle une richesse populaire souvent ignorée : celle d’un patrimoine culinaire vivant, nourri de simplicité et de fierté.
Le maïs grillé, c’est aussi une source de revenus pour des milliers de femmes burkinabè, souvent appelées affectueusement les vendeuses de maïs. Elles bravent le soleil et la fumée, parfois de l’aube jusqu’à la tombée de la nuit, pour faire vivre leur famille grâce à cet humble produit de la terre. Elles sont des héroïnes silencieuses de l’économie informelle, garantes de notre autosuffisance et de notre résilience alimentaire.
Mais derrière cette apparente banalité, une vérité s’impose : la valorisation de nos produits locaux commence par leur reconnaissance. Le maïs grillé mérite mieux qu’un regard distrait ou une consommation machinale. Il mérite qu’on le célèbre, qu’on le protège, qu’on l’élève au rang d’icône nationale.
En ces temps où les fast-foods gagnent du terrain et où les jeunes s’éloignent des traditions, le maïs grillé nous rappelle qu’on peut manger bon, simple, local et sain. Il est un pont entre les générations, entre le rural et l’urbain, entre les racines et la modernité.
Oui, le maïs grillé est un trésor. Il ne brille pas comme l’or, mais il nourrit les corps, les souvenirs et les espoirs. Que nos rues continuent de crépiter. Que nos mains continuent de le tourner sur les flammes. Et que nos cœurs, à chaque bouchée, se souviennent d’où nous venons.
Car parfois, l’essentiel tient dans un simple épi fumant.