
Au cœur du Burkina Faso, là où les traditions se tissent avec grâce au fil des générations, le panem -mooré se dresse comme un symbole de beauté, d’histoire et de résistance culturelle. Bien plus qu’une simple coiffure, cette tresse traditionnelle, profondément enracinée dans le patrimoine moaga et partagé par d’autres communautés, est un marqueur d’identité qui mérite d’être reconnu, valorisé et transmis.

Le panem-mooré, littéralement « coiffure relevée » en mooré, évoque des souvenirs d’enfance, des cérémonies initiatiques, des instants complices entre mères, tantes et filles. Chaque tressage est un acte de patience, d’art et de communion. Il n’est pas rare d’entendre les femmes âgées dire que « les cheveux racontent l’histoire de la femme » et dans cette parole se cache toute la symbolique du panem-mooré : l’état civil d’une femme, son âge, sa position sociale, son statut matrimonial pouvaient autrefois se lire dans les motifs tressés de sa chevelure.
Mais le panem-mooré, ce n’est pas que le passé. Il est aussi une réponse contemporaine aux diktats esthétiques importés qui fragilisent l’estime de soi chez de nombreuses jeunes filles africaines. À l’ère des perruques standardisées, des défrisages agressifs et des produits dépigmentants, retrouver le sens et la beauté du panem-mooré, c’est aussi revendiquer une autre forme d’élégance : une élégance enracinée, consciente et authentique.
Aujourd’hui, de plus en plus de jeunes coiffeuses et stylistes burkinabè revisitent le panem-mooré en l’adaptant aux tendances urbaines : tresses semi-relevées, touches modernes avec des perles ou des fils colorés, mixages avec d’autres styles africains. C’est là tout le génie de notre patrimoine vivant : capable d’évoluer sans se renier, de se renouveler sans s’aliéner.
Il est donc urgent de protéger cette coiffure comme patrimoine culturel immatériel, de l’enseigner dans les écoles de coiffure, de la promouvoir dans les concours de beauté et les festivals, et surtout, de lui rendre sa dignité dans l’imaginaire collectif. Le panem-mooré n’est pas une coiffure « dépassée » : c’est un symbole de raffinement, de sagesse et de continuité culturelle.
Stéphanie Judith BARRO